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HistoriqueJeunesse

L’Enfant d’Oradour, de Régis Delpeuch

By 6 mai 2019février 13th, 2025No Comments

« Mais je ne suis pas un héros. Je n’ai pas choisi d’être le gosse orphelin de Charly ni le petit rouquin rescapé d’Oradour-sur-Glane, comme on m’appelait là-bas ! Je préfèrerais que personne ne me connaisse ni à Limoges ni ici mais que mes parents, mes sœurs et mon petit frère soient encore vivants.
Depuis un an, je pense à eux tous les jours, tout le temps. Et tu sais pourquoi ? Parce que je ne veux pas oublier tous les bons moments avant ce maudit samedi. »

Originaires de Moselle, Roger et sa famille ont été contraints de fuir leur région et de se réfugier à Oradour-sur-Glane où ils mènent une vie heureuse. Jusqu’au 10 juin 1944, jour où des soldats nazis allemands encerclent le village.

Scrineo – 144 pages – 9,90 euros.

Un récit historique poignant et criant de vérité sur l’une des pires atrocités de la Seconde Guerre Mondiale…

Je remercie les éditions Scrineo pour cette lecture qui sort encore une fois de mes préceptes habituels. J’aime vraiment tester de nouvelles choses et découvrir de nouveaux écrits. Et celui-ci, comme ma lecture précédente, ne font que le confirmer. La réalité résonne parfois bien pire que la fiction. Et ce roman là n’est clairement pas tiré de l’imaginaire, mais de la cruauté de certains hommes

Chez les Godfrin, c’est la quiétude qui transparaît dans cette grande famille. Roger et Claude sont encore ensomeillés, alors que les deux jeunes filles sont dans la cuisine en train de prendre leur petit déjeuner avec leur mère. Arthur, le père de famille, relance le feu de cheminée non loin de là. L’hiver venait avec un peu d’avance cette fois. Le calme ambiant fut interrompu par trois coups secs tapés sur la porte d’entrée. Georgette, la mère, retira du feu le lait qu’elle veillait pour aller ouvrir. Depuis l’extérieur, des mots fusèrent. C’était la police allemande. Arthur intima à sa femme de conduire les filles dans leur chambre, alors qu’il allait se charger d’aller à leur rencontre. À peine la porte ouverte, ce sont deux policiers allemands qui entrèrent sans demander leur reste. L’un d’entre-eux pourrait un document à la main.

Un avis d’expulsion. Simple et efficace. Le responsable allemand de la Moselle avait signé cet acte, récupérant ainsi cette habitation, comme toutes les autres dans le village. Les policiers indiquèrent au père qu’ils avaient deux heures pour préparer leurs affaires et se rendre à la place du village. Tout en ne sachant rien d’autre au périple qui allait advenir ensuite… Sur ces mots accablants, les policiers s’en allèrent. La famille Godfrin s’en doutait un peu. Au mois d’août, ce furent d’autres familles qui avaient été délogées dans des villages voisins pour loger des allemands. La guerre leur échappait, et ils étaient victimes de cette occupation étrangère. De plein fouet.

Un roman dont on ne ressort pas indemne, tellement le sujet est brûlant et douloureux.

C’est une lecture aussi bien déboussolante que tragique. Jamais je n’ai autant été impacté par un roman. Et pourtant, je peux vous dire que j’en lis régulièrement. Le sujet est puissant, d’une force incomparable. La Seconde Guerre Mondiale que l’on voit en classe n’a pour ainsi dire rien à voir avec ce livre qui sonne comme un témoignage. Il a été fait pour un public jeune, et le geste est fabuleux. Il n’y a rien de tel pour les captiver et leur transmettre autant d’émotions. Je ne connaissais absolument pas le drame survenu dans ce village, et c’était pour moi une découverte brutale. Je ne pensais pas cela possible, et pourtant, il n’y a pas de limites à l’atrocité humaine. Et ce roman est là pour le rappeler, avec toute la puissance qui ressort de ses pages. J’avais envie de connaître ce qui attendait le jeune Roger, et le destin de toute sa famille, même si je me doutais de l’issue. C’était plus fort que tout.

Le style d’écriture est limpide, et s’adresse à tous. Il est aisé de s’imaginer les scènes, alors que les images perdurent. Tout y est retranscrit avec beaucoup de soin, et les détails sont nombreux. On ressent la véracité des propos de l’auteur, et je n’ai pas pu m’empêcher d’effectuer des recherches pour bien comprendre la localisation des différents villages qui prennent part dans cette histoire. Roger est un jeune enfant courageux, qui n’a pas choisi sa vie, ni même d’être là, chassé de son village natal pour se retrouver à des centaines de kilomètres de là, pour jouer encore une fois de malchance, mais bien plus grave et immuable. Ce court récit ne m’a pas laissé indifférent, et les paroles de Roger, en toute fin de ce roman, sont parmi les plus dures à encaisser, en vue de tout ce qu’il a pu traverser auparavant. Il n’avait pas l’âge pour subir de telles choses. Mais y a-t-il vraiment un âge ? Ce livre est une source de savoir, mais aussi une mémoire, envers ceux que l’on ne peut pas se permettre de laisser sombrer dans l’oubli. Pour que plus jamais un tel acte ne puisse se reproduire.

Ma note : 5/5

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