« Votre âme s’est étourdie aux lumières de Londres, et vous avez oublié que Camelot était le coeur d’Arcadia… »
Londres, 1872.
Dans le monde d’Arcadia, la réalité a les couleurs du rêve : un royaume idéal, baigné de féerie arthurienne, dans lequel les ministres sont poètes et les artistes sont rois, où le futur est tabou et la mort improbable.
Un jour pourtant, d’étranges présages viennent troubler la sérénité de la belle capitale. Neige bleutée, vaisseau fantôme… Le peintre Rossetti et ses amis se sentent mystérieusement concernés. Cent quarante ans plus tard, dans un Paris agonisant plongé sous les eaux, quatre jeunes gens férus d’art victorien entendent le même appel, et s’apprêtent à déchirer le voile qui sépare les deux mondes.
Bragelonne – 357 pages – 20,00 euros.
Un rendez-vous dans la poésie et l’étrange…
Que dire de ce roman à part que la collection steampunk de Bragelonne m’a fortement attiré à lui. Cette belle couverture cuivrée appelle notre regard sans peine… Sauf que de steampunk, il n’a que le nom. J’ai été déçu par le manque de références à cet univers qui est pourtant bien riche en machines et en constructions de toutes sortes. Arcadia n’y fait que de rares incursions et c’est bien dommage !
Cette intégrale comporte deux tomes : Vestiges d’Arcadia et La Musique du Sommeil. Des titres rêveurs et poétiques, comme l’est ce roman. Le premier tome, assez court et difficile à suivre, est une succession de scènes qui met doucement en place les personnages et l’univers dans lequel le second tome va évoluer. On s’y perd facilement, mais on ne peut qu’apprécier les connaissances faramineuses de Fabrice Colin dans le domaine de l’art. Des références artistiques sont omniprésentes et les protagonistes que nous allons suivre ont été les génies de leurs temps.
Si beaucoup abandonnent leur lecture en cours de route, je les comprends. Seuls les derniers chapitres des Vestiges d’Arcadia valent la peine d’être lus et compris. Ne serait-ce que pour la philosophie qu’ils portent.
Puis viens le moment du rêve dernier. Un jour, votre esprit se noie dans Lethe, et n’en sort plus : il y reste à jamais, se mêle à tous les autres esprits, à tous les autres rêves, s’oublie dans les songes des autres et ne fait plus qu’un avec la rivière. Voilà ce qu’on appelle la mort.
Le second tome, lui, est davantage structuré, même s’il reste toutefois assez compliqué de suivre les événements avec clarté. Il faut sans cesse s’accrocher et éviter les pauses entre les chapitres de peur de perdre le fil. Certaines scènes sont belles, étonnantes et d’une description sans faille, comme si la magie s’était mêlée à la fin du monde qui les attend pour la rendre plus douce.
On comprend mieux les enjeux dans La Musique du Sommeil. Il faut sauver la reine pour que le couronnement ait lieu, sans quoi le monde sera perdu à tout jamais. Entre Arcadia et Ternemonde (notre monde), un voile existe qu’il faut déchirer à l’aide d’Excalibur. Les références aux contes d’Arthur et aux Chevaliers de la table ronde se font en filigrane, tout comme l’apparition du jabberwocky issu d’Alice au Pays des Merveilles. Ce second tome est une explosion de pensées, de magie et de liens avec d’autres œuvres et artistes.
En bref, même si la quatrième de couverture (et la couverture en elle-même !) font rêver. Le contenu n’est pas forcément le contenant. Je pense que c’est un roman à lire, ne serait-ce que pour les pensées et la magie qu’il diffuse. Mais il faut s’y plonger sans a priori et sans attentes, en se laissant prendre au jeu, même si cela n’opérera pas forcément sur vous. Bon voyage !